Thérèse Wartel, première exégète de Beethoven : un regard féminin sur les Sonates pour piano de Beethoven ?

La pratique du piano a connu une expansion considérable pendant la première moitié du XIXe siècle. Si cette émergence s’est accompagnée d’un engouement exceptionnel chez les instrumentistes féminines, les contextes de ces pratiques n’ont pas échappé à des répartitions genrées : le piano étant le seul instrument (avec le chant) enseigné dans le cadre institutionnel, et même recommandé dans le cadre d’une éducation bourgeoise , la question se pose de la spécificité et des enjeux d’une pratique pianistique féminine.
La musicienne française Thérèse Wartel (née en 1814 et morte en 1865 à Paris) a décliné les différents registres d’une pratique professionnelle circonscrits par les attendus et les territoires à conquérir : pianiste, pédagogue, compositrice, critique musicale (notamment sous un pseudonyme masculin).
Reconnue et célébrée de son vivant comme une grande pianiste « classique », elle a également publié en 1865 ce qui constitue à ce jour la première exégèse féminine du répertoire pour piano de Beethoven, figure archétypale du génie masculin.
Son ouvrage s’inscrit autant dans l’étude de l’histoire de l’interprétation que dans celle de la représentation du compositeur allemand, l’établissement des canons musicaux et la construction du mythe beethovénien, bien avant que Romain Rolland juge qu’il n’aimait « point entendre Beethoven interprété par des femmes ».
Une partie de ma recherche est basée sur une étude comparative des différentes exégèses beethovéniennes antérieures ou contemporaines à celle de Wartel. Leur développement parfois très littéraire sous forme de leçons écrites (comme chez Thérèse Wartel, mais aussi chez d’autres critiques) permet de dégager des hypothèses concernant une éventuelle représentation spécifiquement féminine de Beethoven.
Ma recherche me permettra d’émettre des hypothèses et d’apprécier la prétendue spécificité féminine de cet ouvrage depuis lors tombé dans l’oubli, spécificité comme marqueur d’infériorité, et qui avait été regrettée dans la critique au moment de sa publication.