Le syndrome du côlon irritable est un trouble digestif chronique fonctionnel généralement caractérisé par des douleurs abdominales, un inconfort digestif, et une perturbation du transit intestinal. Aujourd’hui, nous sommes pratiquement certains que le SCI est étroitement lié au stress. En effet, nous savons actuellement que ce dernier est à l’origine d’un dérèglement du gut-brain axis et de la flore intestinale (et ceci de par l’activation du système nerveux autonome, et la libération d’ACTH et de cortisol), et il est fortement admis que ce déséquilibre est à l’origine de l’apparition et de la sévérité des symptômes du SCI. Une forte corrélation a également été observée entre la sévérité des symptômes du SCI et l’anxiété/la dépression. De plus, la douleur, symptôme extrêmement courant (y compris les douleurs abdominales), est très variable dans sa perception selon les patients, du fait de sa subjectivité par nature. En effet, la perception et l’expérience de la douleur impliquent non seulement des composantes sensorielles, mais aussi - et surtout - des aspects psychologiques, affectifs, émotionnels et cognitifs, qui expliquent la forte subjectivité de l’expérience hyperalgique.
Aussi, depuis les temps les plus reculés, la musique était un moyen efficace et inoffensif pour soulager la douleur. En effet, les effets anxiolytique et analgésique de la musique sont désormais bien documentés : la musique réduit l’anxiété en procurant du plaisir (en raison de son action directe sur plusieurs zones corticales supérieures du cerveau et sur plusieurs circuits neuronaux, et aussi de la capacité du cerveau à traiter la musique comme un langage), et ceci s’applique particulièrement à la musique personnalisée/préférée. Il a également été démontré que la musique modale peut affecter l’humeur de l’auditeur par la valence émotionnelle (ethos) qui caractérise chaque mode. L'effet analgésique de la musique, lié à l'anxiolyse et aussi dû à la distraction, a été établi notamment avec la musique préférée (personnalisée), car les émotions suscitées par cette musique ont également été associées à son effet modulateur de la douleur. Physiologiquement, la musique agit sur les structures de la « neuromatrice » dans le cerveau pour réduire les niveaux de cortisol (théorie de la neuromatrice), et augmente également la libération de dopamine et d’autres opioïdes endogènes dans le système limbique (théorie du gate control).
Dans ce contexte, en montrant l’étroite relation du SCI au stress et la forte subjectivité de la perception douloureuse d’une part, et les mécanismes neurologiques, biologiques et psychologiques derrière les effets anxiolytiques et analgésiques de la musique d’autre part, nous avons jugé pertinent de tenter d’étudier l’effet d’une musique monodique modale personnalisée sur la douleur abdominale et sur le transit intestinal chez des patients ayant le SCI. Cette étude permettra par la suite, si la non-infériorité de la musique par rapport au traitement médical est établie, de considérer la possibilité de remplacer les médicaments par l’écoute musicale dans certains cas de SCI.